Un Franco-congolais qui a visité son pays d’origine il y a quelques jours, m’a dit que l’atmosphère générale au Congo lui rappelle la pièce de Samuel Beckett " En attendant Godot". C’est un climat d’attente insoutenable.
Tout le monde a le sentiment que la fin du cauchemar est proche, mais personne ne sait de quelle manière Sassou Nguesso et son régime vont tomber. "Ça ne peut pas continuer comme ça" ne cesse de répéter le commun des citoyens. Mais la majorité se sent désarmée. Elle est fataliste, résignée. Elle attend un coup du Destin. Mais ce coup n’arrive pas. Et le dictateur respire encore...
Cette attente a atteint les hautes sphères de l’État. Certains hauts responsables expriment leur ras le bol en privé, mais personne n’ose prendre l’initiative. Pourquoi ? Il y a une notion qui revient sans cesse dans tous les livres qui racontent les histoires des dictatures : "atomisation de la société". Une société atomisée est une société où les citoyens sont écrasés par le poids du système Etat-Parti et ne peuvent s’associer dans des organisations autonomes les rendant solidaires les uns des autres. Le système totalitaire occupe et contrôle tous les espaces publics. Rien ne lui échappe. Une organisation pyramidale, où Parti et Police collaborent étroitement, assure le contrôle de la société à tous les niveaux.
Tous les dictateurs savent que rien ne vaut l’autocensure et la peur intériorisée. La peur est partout. Elle habite aussi bien le Premier ministre Isidore Mvouba que le simple ouvrier de l’État. Il suffit de faire croire aux gens que le système est omnipotent pour qu’il devienne réellement omnipotent. En outre, l’enfer vécu par les familles congolaises lors de la guerre de 1997, les militants des droits humain est le meilleur moyen de "convaincre" les citoyens de l’inutilité de toute forme de résistance. S’il est interdit de critiquer le comportement d’un simple policier alors que dire de celui d’un responsable politique, d’un membre de "la famille" du Parrain ?
La question n’est plus de démasquer le système. Le roi Sassou Nguesso est nu depuis belle lurette. Mais de faire bouger les choses, de passer de la dénonciation à la planification de la chute de la dictature. Le dictateur congolais sait qu’il est haï par son peuple. Il sait qu’il ne sera plus invité ni en Europe ni en Amérique par Obama. Il sait, enfin, qu’il ne pourra plus jamais s’acheter une nouvelle virginité en possédant 112 comptes bancaires rien qu’en France. Mais il sait aussi que la moindre ouverture risque de le faire tomber. C’est l’impasse.
Le dictateur d’Oyo continuera à naviguer à vue jusqu’au dernier jour de sa vie politique. Mais pour lui, la Cour du Tribunal Pénal International est la cour de tous les dangers. Comme tous les dictateurs, il se méfie des projecteurs des médias comme de la peste. L’assassinat de journaliste d’investigation Bruno Ossébi du journal en ligne de Mwinda Press est un avertissement à tous les journalistes présents à Brazzaville et en exil.
Le régime congolais sait très bien que la présence d’une trentaine d'observateurs accrédités par l'Union africaine (UA) qui seront déployés au Congo, de même que plusieurs superviseurs de la Francophonie, pour l'élection présidentielle du 12 juillet, annoncé par le ministre des Affaires étrangères, Basile Ikouébé, est une chance unique pour le peuple congolais de se soulever sans risquer d’être réduit au silence par le lugubre bruit des blindés et les funestes rafales de mitraillettes.
Qui chassera Sassou Nguesso d’Oyo ? La maladie ? Le peuple, en se soulevant ? Ou un nouvel artisan d’un « Chemin d’avenir » bis, qui anticipera les événements ? Si le futur était prévisible, tout le monde mourrait d’ennui...
Wallys KIMBATSA